Deux articles en ligne sur des églises orthodoxes en Tunisie ont été publiés récemment, l’un sur l’église orthodoxe russe de Tunis, de la Résurrection (photographie ci-dessus), consacrée en 1956 par saint Jean de Shanghai et de San Francisco, et l’autre sur l’église Saint-Alexandre-Nevsky de Bizerte, édifiée en 1937 et 1938.
This post is also available in:
English (Anglais)
Découvrez l’histoire de l’Église orthodoxe russe de l’avenue Mohammed V!
Située sur l'avenue Mohammed V de Tunis, l'église orthodoxe russe de
Tunis est une église qui date des années 1950. On vous fait découvrir
l’histoire de cet édifice religieux!
Consacrée en 1956 par l’archevêque Jean Maximovic ou Saint Jean de Shanghai et de San Francisco de l’Église russe hors frontière pour
l’Europe occidentale, l’église orthodoxe russe de Tunis, également
appelée église chrétienne orthodoxe russe de la Résurrection, est l’un
des édifices emblématiques de la ville de Tunis.En passant devant, on remarque sa dissemblance avec le reste des bâtiments de l’avenue Mohammed V et de la ville de Tunis. Elle est effectivement une reproduction stylisée de l’église de l’Intercession-de-la-Vierge sur la Nerl située près de Moscou, en Russie.
L’église orthodoxe russe de Tunis a été érigée sur une propriété de la communauté des Russes Blancs. Durant les années 1950, deux communautés russes orthodoxes étaient déjà installées à Tunis et à Bizerte depuis les années 1920 lorsqu’une vague de réfugiés de la flotte de l’Armée blanche a débarqué en Tunisie.
Elle a remplacé le local de la Médina dans lequel se déroulaient les offices. Le projet de construction dirigée par l’architecte Mihail Fedorovic et l’ingénieur Vladimir Efimovic Lagodovskij, membres de la communauté des Russes blancs, a duré trois années.
Source : Juliette Hueber et Claudine Piaton (dir.), Tunis Architectures 1860-1960, Ed. Honoré Clair (2016)
Saint Jean Maximovic de Shanghai et de San Francisco
(4 juin 1896 - 2 juillet 1966)
Archimandrite Thomas
Réjouis-toi, Saint Hiérarque Jean,
toi qui allas vers tous les méprisés,
et tous les ignorés,
toi qui t’es approché
des enfants abandonnés et délaissés
pour les accueillir
et leur offrir ta protection.
Parler
du Père Jean semble facile pour autant que l’on n’entre pas dans le
détail des évènements de sa vie, car les actions miraculeuses et les
lignes forces de sa passion évangélique et christologique étaient
caractéristiques de sa vie unique et resplendissante. Mais combien
difficile est-il, par contre, de s’efforcer de s’approcher de la
profondeur exceptionnelle et de la ténacité inégalée qu’il déployait
dans ses activités.
Pour
la petite histoire il est toujours agréable de rappeler l’irritation de
la noblesse, qui n’hésitait pas à s’adresser à la hiérarchie ecclésiale
pour ordonner à ce « va-nu-pieds » d’évêque, de se chausser. Dans la
plus parfaite obéissance Vladika accepta les chaussures qu’on lui offrit
pour les emporter sous ses bras, déclenchant ainsi l’hilarité de
certains mais surtout l’irascibilité d’autres qui n’y comprenaient rien.
Tout
aussi plaisante est l’histoire de l’invitation à dîner qu’il avait
reçue et où il avait été placé en tête de table, près de l’épouse de
l’hôte qui s’était ornée les lèvres du rouge le plus flamboyant, alors
qu’il était bien connu que Vladika avait une sainte horreur du rouge à
lèvre. Il feignit ne pas réagir à cet éblouissant spectacle coloré mais
au moment où la soupe fut servie, il la porta à sa bouche et la versa
sur ses lèvres d’où elle dégoulinait dans sa barbe, la décorant ainsi de
vermicelles. Soudain, la dame comprit la raison du comportement étrange
de l’évêque et s’empressa, aussitôt, d’essuyer son rouge à lèvre, sur
quoi l’évêque poursuivit normalement son repas.
Il
n’avait nullement l’intention de se rendre intéressant, ce qu’il
faisait, en revanche, c’était de rendre l’assistance attentive à
l’importance de vivre sa vie en Christ ; il voulait être un véritable
évêque, un berger pour son troupeau, un père pour ses prêtres, un
successeur et épigone du Christ, le Bon Pasteur. Et nous savons tous que
Vladika Jean fut cet évêque, une icône en chair et en os de son Maître.
Après
son sacre, dans sa première homélie comme évêque, il témoigna en
paroles de ce qu’il ferait, magistralement, en actes plus tard : il
aspirait à se donner à sa tâche corps et âme, afin de, pour reprendre
ses propres paroles, achever la mission du Christ : Le Christ est
descendu sur la terre pour rétablir en l’homme l’icône de Dieu qui avait
été dénaturée ; pour appeler les hommes afin de les ramener à l’unité.
Il appartient au berger de renouveler et d’éclairer les hommes. Que
peut-il y avoir de plus grand que de recréer la Création de Dieu ? Que
peut-on offrir de mieux à son prochain que la préparation à la vie
éternelle ? C’est de cela, précisément, qu’il avait fait sa mission :
ouvrir à tous les portes du Royaume de Dieu, sans distinction de race,
de couleur ou de langue, en disant : Pénétré de l’universalité de
l’Eglise, le soin du berger ne saurait se limiter aux seules brebis qui
lui ont été confiées, mais il doit porter les yeux de son cœur sur la
totalité de l’Eglise du Christ.
Vladika
Jean n’appréciait pas le luxe, ni la pompe ni l’éclat. Jamais il ne s’y
était associé en donnant pompeusement des ordres depuis les hauteurs de
son trône épiscopal. Jamais il ne cherchait à se faire remarquer ou à
impressionner, il s’opposait violemment à pareil comportement. Il avait
en horreur ceux qui jouent la comédie et il ne supportait pas les
ecclésiastiques paradant à l’autel. La vanité dont un éventuel évêque ou
archimandrite pouvait se rendre coupable déclenchait inévitablement une
réaction ferme de la part de Vladika Jean. Dans ce contexte, le récit
cocasse suivant est d’ailleurs bien connu : un évêque que je ne nommerai
pas était tellement fier de sa nouvelle mitre que Vladika se rua sur
lui et la lui enfonça de ses deux mains jusqu’au narines… la petite
taille de Vladika et l’imposante stature de ce grand évêque ne faisait
qu’ajouter au tableau… L’évêque était ainsi obligé de continuer à
célébrer l’office à l’autel littéralement à « l’aveuglette », aveuglé
qu’il était de vanité. Pour Vladika Jean, il n’y avait pas de place pour
les honneurs humains ou l’orgueil à l’autel où l’on servait Dieu. Il
était toujours et partout un serviteur de Dieu et le vivait humblement
tous les instants de sa vie. C’est précisément cela qu’il cherchait à
enseigner à tous les chrétiens, et en premier aux prêtres, car tous ceux
qui se trouvaient, se trouvent ou se trouveront devant l’autel du
Christ s’y trouvent en Son Nom et non en leur nom.
Il
abhorrait tout signe d’autorité et défendait l’orthodoxie vraie telle
qu’il l’avait pratiquée et vue pratiquée, et voulait transmettre ce
savoir à tous ceux qu’il rencontrait, où que ce soit, dans tous pays ou
régions, partout où il passait. Il définissait sa mission à Shanghai
ainsi : «C’est pour cela qu’on m’envoie en Orient, dans les contrées
dites du soleil levant, mais qui ont surtout besoin du rayonnement
spirituel du Soleil de Justice. » Annoncer le Christ en paroles, et
humblement le prendre en exemple dans ses propres agissements étaient
son but, sa mission sur terre. Rien ni personne ne pouvaient l’en
détourner
Le
Christianisme véritable ne se résume pas à des considérations
intellectuelles mais doit être le cœur de la vie. Le Christ n’est pas
descendu sur terre pour donner aux hommes des connaissances nouvelles,
mais pour les appeler à une vie nouvelle. Son ascèse et sa vie de prière
en étaient des exemples vivants et atteignaient une profondeur
inimaginable selon les normes modernes. Vladika ne dormait jamais plus
de deux heures par nuit, et jamais dans un lit, soit dans une chaise,
soit à genoux devant les icônes. Le reste du temps il priait, car son
cœur était tellement grand qu’il vivait la douleur ou la tristesse que
les fidèles lui confiaient dans ses propres entrailles. Il n’est donc
pas surprenant que Dieu l’ait glorifié par des signes extérieurs
visibles. Pendant la proscomédie à laquelle il consacrait toujours
énormément de temps, il lui arrivait d’être tellement pris par la prière
qu’il s’élevait d’un demi mètre au dessus de la terre sans même qu’il
ne s’en rendît compte. En célébrant la Divine Liturgie il lui arrivait
souvent d’être illuminé de la lumière incréée à la plus grande
stupéfaction de nombreux fidèles bien sûr.
Tout aussi remarquables étaient son amour pour l’homme et sa confiance en Dieu.
Dans
une allocution il disait : «Dans son souci du salut des âmes, un berger
ne peut ignorer les inévitables besoins physiques de l’homme. Il ne
devrait pas être permis de prêcher l’Evangile sans effectivement
manifester de l’amour. »
Ce
n’était pas parce qu’il était évêque qu’il aurait renoncé à se rendre
dans les quartiers les plus mal famés et les ruelles les plus sombres de
Shanghai pour aller à la recherche de bébés abandonnés dans les
immondices, ou d’enfants handicapés ou mutilés rejetés de la société. Il
les accueillait tous dans son cœur, et un grand nombre aussi dans son
orphelinat. On pourrait même dire qu’il est miraculeux qu’il n’ait pas
été assassiné dans ces endroits qui ne connaissaient pas le luxe de
l’électricité ; en effet, c’étaient des endroits obscurs, au propre et
au figuré, où se passaient des choses qui ne supportent de toute façon
pas la lumière.
Peut-être
pensait-on que ce petit homme courbé qui déambulait dans les rues de
Shanghai était un pauvre petit évêque dépravé à la recherche de quelque
bibelot qu’il vendrait pour avoir de l’argent avec lequel s’acheter de
l’alcool ou de l’opium. Les prêtres de l’époque auront sans doute
également trouvé ce comportement particulièrement choquant. Mais j’ai
quand même beaucoup de peine à comprendre qu’il puisse y avoir eu des
prêtres qui n’appréciaient pas leur évêque, pire même, qui voulaient sa
mort. Mais comment se peut-il donc, que des personnes qui prétendent
annoncer et expliquer l’Evangile à l’Eglise, se permettent, pendant la
Nuit Pascale, d’ourdir des complots afin d’empoisonner Vladika Jean en
mélangeant du poison au vin qu’il utiliserait pour nettoyer le calice,
lui, qui était un Evangile vivant, mais en tous points identique à celui
que ses détracteurs proclamaient pompeusement ?
Mais
il s’attendait à ce genre d’avatars lorsqu’il disait : La tâche d’un
berger n’est pas facile, car il doit lutter contre la nature de l’homme
contaminée par le péché; souvent il se heurte à l’incompréhension, ou à
l’opposition délibérée, voire à la haine de ceux qu’il aime et qu’il
essaie de secourir. Le sens du sacrifice de soi, l’amour qu’il porte à
son troupeau doivent être incommensurables.
Vivre
réellement et foncièrement l’Evangile dans ces proportions radicales
là, ne plaît sans doute pas trop à l’homme parce que cela le force à
réfléchir et à méditer sur ses propres actes. Pareille introspection
interpelle la conscience et suscite des interrogations et des défis que
l’on préfère esquiver. Des déclarations grandiloquentes et ronflantes à
propos du « multiculturalisme » et de « l’inter religiosité » ne lui
étaient pas réservées. Seul comptait son amour chaleureux et cordial
pour ceux qui étaient marqués par la vie ou ployaient sous la tristesse
et l’échec. C’est à eux que s’adressaient toute son attention et ses
soins, sans distinction de race, de couleur, de sexe, d’origine, ou de
confession. Entendons ses propres paroles : Le berger doit sentir la
douleur de ses brebis. Sa vie ne lui appartient pas, il doit être
capable de subir toute vexation ou persécution, voire la mort, pour les
guérir..
Quand
Vladika Jean agissait, il le faisait dans la plus grande simplicité,
comme simple serviteur de Dieu. Lorsqu’un jour il alla, au vu et au su
de tout le monde, dans un grand hôpital de Shanghai, il s’y rendit
d’abord, à la consternation générale, dans une chambre où une mère juive
soignait son fils qui fut guéri par la prière de Vladika, sans qu’il
ait tenu compte de la confession de cette personne. Pour Vladika Jean,
toute personne, quelle qu’elle soit, était un enfant de Dieu et une
icône du Christ. Là où régnait la misère, il était le premier arrivé
pour apporter réconfort et consolation. L’Archevêque Jacques, de
bienheureuse mémoire, racontait comment, lors du retour de Vladika Jean
aux Etats-Unis après une tournée en Europe, il refusa obstinément de
prendre la route de l’aéroport de Schiphol où l’avion était prêt pour le
départ, pour aller, à la stupéfaction générale, au chevet d’un mourant
inconnu dont il avait entendu intérieurement l’appel à l’aide. Le Père
Adrien lui dit : « Vladika, vous allez rater l’avion ! » D’un mouvement
brusque, il se retourna et répondit sèchement : « Est-ce que c’est vous
qui assumerez les conséquences s’il devait mourir …? » Vladika s’est
donc rendu à l’hôpital, a prié et entendu la confession du mourant.
L’avion, toujours prêt pour le départ, n’a décollé que lorsque Vladika
Jean s’était enregistré et était monté à bord.
Vladika
Jean répondait aux besoins des hommes et ne permettait jamais que la
moindre préoccupation sociale empêchât un prêtre de remplir ses
fonctions ecclésiales. A son esprit étaient toujours présentes ces
paroles de l’Ecriture Sainte : « Il ne convient pas que nous délaissions
la parole de Dieu pour le service des tables. » ( Actes 6,2)
Très
chers frères et sœurs, la vie de Vladika Jean est truffée de scènes
miraculeuses qui faisaient et font encore toujours le tour du monde,
même sur l’internet maintenant. Exemplaires et réputés étaient l’élan
foncièrement chrétien et la passion évangélique de son parcours de vie :
une vie d’humilité dans son amour énorme et à la fois noble pour Dieu,
pour l’homme, et pour la vérité de la Foi Orthodoxe. N’est-il pas
regrettable que ceux qui suivent son exemple soient si rares?
Edifiée vers la fin des années 1930, l’église Saint-Alexandre-Nevski
ne passe pas inaperçue dans la ville de Bizerte grâce à son
architecture remarquable. On vous fait découvrir l’histoire de cet
incroyable bâtiment!
Située à Bizerte, l’église Saint-Alexandre-Nevski est
une église dépendant de l’Église orthodoxe russe édifiée entre 1937 et
1938. C’est en souvenir de l’escadre russe que cette église fut
construite suite à l’autorisation des autorités françaises en 1936. Le
projet de construction a été confié au colonel du génie N.S.
Soukharjevski et l’église a été dédiée à saint Alexandre Nevski.
Construite en style néo-russe, l’intérieur de cette église est aussi splendide que son extérieur. On y trouve une plaque de marbre où sont gravés les noms des navires de l’escadre russe de Bizerte. Les portes royales de l’iconostase sont recouvertes du drapeau de Saint-André, emblème de la marine impériale russe.
Restaurée après la Seconde Guerre mondiale, cette église fut abandonnée pendant quelques années lors de l’indépendance de la Tunisie en 1956. En effet, à l’exception des deux services célébrés à Noël et à Pâques, l’église a été laissée à l’abandon car la plupart des paroissiens russes ont quitté la Tunisie à cette époque.
Mais à partir de la fin des années 1980, la vie paroissienne reprend petit à petit avec le retour des épouses de Tunisiens originaires de Russie, de Biélorussie ou d’Ukraine qui se sont installés dans les environs de l’église.
En 2006, le Conseil municipal de Bizerte a décidé de baptiser la place devant l’église du nom d’Anastasia Manstein-Chirinsky qui fut officieusement à la tête des paroissiens pendant de nombreuses années et la dernière survivante de l’époque de l’escadre russe.
Construite en style néo-russe, l’intérieur de cette église est aussi splendide que son extérieur. On y trouve une plaque de marbre où sont gravés les noms des navires de l’escadre russe de Bizerte. Les portes royales de l’iconostase sont recouvertes du drapeau de Saint-André, emblème de la marine impériale russe.
Restaurée après la Seconde Guerre mondiale, cette église fut abandonnée pendant quelques années lors de l’indépendance de la Tunisie en 1956. En effet, à l’exception des deux services célébrés à Noël et à Pâques, l’église a été laissée à l’abandon car la plupart des paroissiens russes ont quitté la Tunisie à cette époque.
Mais à partir de la fin des années 1980, la vie paroissienne reprend petit à petit avec le retour des épouses de Tunisiens originaires de Russie, de Biélorussie ou d’Ukraine qui se sont installés dans les environs de l’église.
En 2006, le Conseil municipal de Bizerte a décidé de baptiser la place devant l’église du nom d’Anastasia Manstein-Chirinsky qui fut officieusement à la tête des paroissiens pendant de nombreuses années et la dernière survivante de l’époque de l’escadre russe.
Voir aussi
Historique de l’accueil de la tradition de l’Église orthodoxe dans les pays d’Afrique subsaharienne au début du XXe siècle
Patriarcat grec Orthodoxe d’Alexandrie et de toute l’Afrique
Patriarcat grec Orthodoxe d’Alexandrie et de toute l’Afrique
Δεν υπάρχουν σχόλια:
Δημοσίευση σχολίου